02 avril 2006

ENFANTS SAGES, ENFANTS PAUVRES

Ce matin, le sens de la couverture du Spiegel m'échappe. L'image est à la fois laide, dure et quasi indéchiffrable. Je finis par comprendre, avec l'aide du vendeur de journaux. Cette photo volontairement sombre et floue illustre les violences entre élèves, en Allemagne et particulièrement à Berlin. En dix ans, le nombre des agressions en milieu scolaire a dramatiquement augmenté, en fait il a doublé, avec des actes de plus en plus graves.

Violence, division... Elle est bien sûr partout, en Europe, en Afrique, en Amérique. Il suffit pour la comprendre de parcourir les villes, de lever les yeux sur les façades. Es-tu du bon côté ou du mauvais côté ? Si tu es né du bon côté, tu seras sage... Les enfants sages vivent dans les cités bleues héritées du marxisme brejnévien, propres, nettes, pas belles mais solides, puissantes. Peut-être belles finalement, à cause de cette puissance, à cause de ce bleu... Ils jouent au hackysack, font de leur mieux au collège et aspirent à des quartiers plus gais, plus variés. A une vie normale, ensoleillée. Les enfants pauvres… d’où viennent-ils ? Exposant des regards naïfs, pleins d’espoir, je les vois arriver ici par le Sud, les mains sales mais si belles. Est-ce que pour eux ce sera encore la mort dans les squats pourris ? Que peut leur offrir la ville ? Ou sauront-ils être plus malins, plus patients ? Plus courageux, peut-être ?



La cité bleue, entre la gare de l’Est et Karl Marx Allee.




L’innommable. Ce squat de Köpenicker Strasse est habité, ses occupants sont à son image. « Alternative » me dit un ancien de l’Est, si aimablement correct avec son chapeau et son écharpe. Mon angoisse devant cette poubelle humaine égale la sienne. Plantée au milieu de la rue, on dirait une ruine dans SimCity. C’est à peine réel, mais cela est.



Savigny Platz, Berlin ouest. Vous voyez l’illustration au début des albums de Conrad et Paul, la série de Ralf König ? Elle montre leur appartement si tranquille, si coquet, abrité derrière un arbre… C’est là, l’immeuble rose…